Est-il normal d’avoir au 21e siècle une fiscalité reposant sur des principes datant du 19e siècle?

mai 2022 /

Le 26 avril dernier, Yours Business & Family Advisory SA a convié, en présence d’une quarantaine de professionnels du droit et du chiffre, Me Sabrina Scarna, avocate fiscaliste, le professeur Etienne de Callatay, économiste et le professeur Edouardo Traversa, professeur de droit fiscal, pour un débat autour de la fiscalité en réfléchissant à la question : Est-il normal d’avoir au 21e siècle une fiscalité reposant sur des principes datant du 19e siècle ?   

Guidés par les interrogations souvent exprimées : Ne serait-il pas normal que notre fiscalité évolue en fonction de notre cycle de vie ?  Ne serait-il pas normal que notre fiscalité soit impactée par nos comportements : que celui qui pollue plus paie plus ?  Ne serait-il pas normal que les dépenses d’investissement que nous faisons pour améliorer la qualité de notre patrimoine ne puissent pas être amortie de nos impôts ? 

Les intervenants ont échangé sur les thèmes suivants :

  1. Une vision intégrée de la fiscalité sur le cycle de vie
  2. Une fiscalité différente sur le patrimoine et sur sa transmission
  3. Un verdissement de la fiscalité.  
  4. Une évolution des principes : vers une baisse des taux et un élargissement de l’assiette
  5. Fiscalité doit rimer avec sécurité juridique.

Au terme d’un débat riche, nous avons pu relever comme idées phares :

  • La fiscalité doit être au service du mieux-être au sein de la Société et pas principalement un instrument budgétaire.   Cela renforcera l’acceptation de l’impôt.   Le « bon impôt » est celui qui est considéré comme juste par l’ensemble des membres de la collectivité. 
  • Une fiscalité évolutive au cours du cycle de vie permettrait aux individus de disposer de suffisamment de moyens au commencement de leur vie professionnelle et familiale pour s’installer et établir leur famille.   Il conviendrait de mettre en place une perception de l’impôt sur une base pluri-annuelle qui tiendront compte des événements de vie (maladie, accident, chômage) qui privent les individus de revenus.
  • La fiscalité sur le travail est à ce point discriminante qu’elle entraîne des comportements d’évitement de la fiscalité qui obère la notion d’équité en matière de fiscalité (mise en place de société de management, forme de rémunération alternative,…).   Une progressivité des taux d’imposition plus étalée limiterait ce type de comportement.
  • La fiscalité sur le patrimoine devrait être différente selon que le patrimoine a été reçu ou a été acquis au terme d’une activité professionnelle.
  • L’imposition de la plus-value sur la cession d’actifs, notamment sur les actions, est à envisager.  Elle est à moduler en fonction de la durée de détention de l’actif et doit permettre de préserver l’investissement dans le capital à risque.   Une différence doit être faite entre la cession, avec plus-value, d’une participation dans un outil de travail et la cession, avec plus-value, d’actifs dans le cadre de la gestion d’un portefeuille.
  • Les droits de successions sont actuellement considérés comme une « taxe sur la mort », et perçus de manière très injuste par les familles qui n’ont pas eu l’opportunité d’organiser la transmission de patrimoine par donation.   Il conviendrait donc de limiter l’écart de fiscalité entre la transmission par donation et par succession.
  • La fiscalité « verte » a pour principal objectif d’être un des vecteurs du changement de comportement des individus.   Sa « rentabilité » diminue en fonction de l’évolution positive du comportement.  Elle ne peut pas être considérée comme une source à long terme de financement des politiques publiques.
  • La baisse des taux et l’évolution de l’assiette est à envisager de manière simultanée à une suppression des « niches fiscales ».   
  • Il convient de rendre l’impôt compréhensible : avec près de 600 codes, la déclaration fiscale belge est une des plus compliquée au monde.
  • L’impôt n’est plus pour nos gouvernants qu’un moyen budgétaire.    Des impositions sont mises en place sans respecter les principes de légalité.  Cette dérive dangereuse est accompagnée par le comportement des cours et tribunaux qui annulent les dispositions instituant l’impôt sans condamner l’autorité publique à restituer les sommes perçues sur base des dispositions litigieuses.  Cela crée une insécurité juridique
  • L’absence de définitions précises du champ des impôts dans le code est également la source de contentieux, découlant de l’interprétation faite par le contribuable et de celle faite par l’administration. 

A l’issue du débat, les échanges se sont poursuivis entre les intervenants et les invités de Yours.  

Tout ceci nous a permis de conclure que l’impôt n’est pas un « mal nécessaire » mais un instrument à mettre au service du « mieux vivre » en société.  L’absence d’adhésion conduit à la mise en œuvre de comportements d’évitement qui sont néfastes et potentiellement dommageables.  La responsabilité de l’Etat est d’afficher des objectifs clairs et compréhensibles à la contribution au bien public : ceux-ci assureront l’assentiment de tous.

Par l’organisation de cet échange, Yours souhaitait prendre part au débat d’idées qui doit accompagner une nécessaire réforme des principes qui sous-tendent la fiscalité.  Yours souhaite poursuivre l’accompagnement de ses clients dans un cadre accepté par tous.