La taxe sur les comptes-titres a encore fait couler de l’encre

mars 2021 /

Une nouvelle version de la taxe sur les comptes-titres a été adoptée et publiée au Moniteur belge en février dernier. Que faut-il en retenir ?

Le 11 février, une version amendée du projet de loi introduisant une taxe sur les comptes-titres (voir notre article du mois de novembre 2020) a été votée à la Chambre et publiée au Moniteur belge en date du 25 février 2021. L’exposé des motifs confirme que ce nouvel impôt a une finalité budgétaire (contribution à la sécurité sociale).

En gardant les mêmes principes fondamentaux, la dernière version du projet de loi a principalement apporté quelques éclaircissements sur les questions qui subsistaient lors de la première version du projet.  Un certain nombre d’amendements avaient été déposé mais ils n’ont finalement pas été retenus.

La taxe sur les comptes-titres en bref

Il s’agit d’un impôt annuel de 0,15% sur la détention de comptes-titres dont la moyenne des instruments financiers[1] est supérieure à un million d’euros,  indépendamment de l’identité du titulaire du compte (personne physique/personne morale/autre construction juridique étrangère et résident/non résident) ou de la nature des droits détenus sur le compte (pleine propriété, droit indivis, nue-propriété, usufruit).

Un résident belge se verra appliquer la taxe sur l’ensemble des comptes-titres qu’il détient (que ceux-ci soient en Belgique ou à l’étranger).

Un non-résident, lui, devra acquitter cette taxe uniquement sur les comptes-titres qu’il détient en Belgique, sous réserve de l’application de certaines conventions préventives de double imposition (CPDI) conclues par la Belgique et qui réserveraient ce pouvoir d’imposition à un autre État. C’est le cas notamment des CPDI conclues par la Belgique avec les Pays-Bas, le Luxembourg ou encore la Suisse qui feront dès lors obstacle à l’application de la taxe dans le chef des résidents de ces trois pays.

Précisions importantes

Le fait que cette taxe vise directement les comptes-titres et non leurs détenteurs a pour conséquence directe que des comptes-titres d’une valeur légèrement supérieure à un million d’euros détenus par plusieurs personnes soient sujets à l’imposition alors que des comptes-titres d’une valeur légèrement inférieure à un million d’euros détenus par une seule personne, ne seront pas visés.

En outre, les épargnants qui ont investi quelques milliers d’euros dans une assurance-vie investie dans un fonds de la branche 23, devront probablement eux aussi indirectement subir cette taxe malgré qu’ils restent individuellement loin du seuil de 1 000 000 EUR. Les  assureurs peuvent en effet répercuter sur leurs clients les 0,15% qu’ils devront eux-mêmes payer.

Limitation de la taxe

Le montant de la taxe est toutefois limité à 10 pourcents de la différence entre la base imposable et le seuil de 1 000 000 EUR. De cette manière, le gouvernement souhaite éviter que la perception de la taxe ne fasse chuter les actifs sous le seuil de 1 000 000 EUR.

Disposition anti-abus

Afin que d’éviter que contribuable ne se place en dehors du champ d’application de cette taxe par différentes manœuvres, la loi a également introduit une disposition anti-abus. Sont par exemple présumées (de manière irréfragable) constituer un abus les opérations suivantes (visant à éviter l’assujettissement à la taxe) : 

  • Scinder un compte-titre en plusieurs comptes-titres (détenus auprès du même intermédiaire) ;
  • Convertir des instruments financiers imposables, en instruments financiers non imposables.

Dans d’autres cas, par exemple en cas de scission d’un compte-titre en plusieurs comptes-titres réparti sur plusieurs institutions financières, le contribuable (ou la banque) pourra démontrer qu’il n’y a pas abus et que son objectif n’est pas d’éluder l’impôt d’éluder l’impôt. Une répartition des risques auprès de plusieurs banques pourrait par exemple être un motif non fiscal acceptable…

Déclaration et paiement

Cette taxe sera collectée indirectement, c’est-à-dire par le biais de l’intermédiaire financier.

  • Si celui-ci est belge, il sera responsable de la retenue, de la déclaration et du paiement de la taxe.
  • Si celui-ci est établi à l’étranger, c’est le titulaire du compte-titres qui devra en principe se charger lui-même de la déclaration et du paiement de la taxe.

Déjà entrée en vigueur

La disposition elle-même est entrée en vigueur le 26 février 2021. La disposition anti-abus s’applique, elle, de manière rétroactive au 30 octobre 2020 (c’est-à-dire à partir du moment où les médias ont porté la nouvelle mouture de la taxe à la connaissance du public).

Affaire à suivre ?

La taxe fait déjà l’objet de contestations et nous serons attentifs aux évolutions de cette nouvelle version de la taxe sur les comptes-titres.

[1] qu’il s‘agisse d’actions, d’obligations mais aussi de liquidités présentes sur le compte-titre.